Petites règles et grands désagréments (ou le contraire)


Les petites choses qui peuvent vous pourrir une partie selon Dan Heisman.

La partie commence, et au bout de 3 coups, on se rend compte que le roi et la dame d’un camp n’ont pas commencé sur les bonnes cases. Le joueur avec ses pièces en bonne place en fait la remarque, et face à un adversaire débutant, déplace les 2 pièces sur les bonnes cases. Pas bien ! Il aurait fallu bien sûr appeler l’arbitre. Si c’est avant le dixième coup, les pendules ne sont pas remises à zéro et la partie peut reprendre ainsi. Mais après le 10ème coup : trop tard, la partie continue avec cette erreur.

Les coups illégaux sont probablement une des causes les plus fréquentes de demande d’intervention de l’arbitre. Il faut bien évidemment le faire intervenir après qu’ait été réalisé le coup considéré illégal à partir du moment où la pendule a été enclenchée. Si on lâche la pièce elle est jouée, si elle est touchée, elle doit être déplacée. Si on attrape une pièce d’un adversaire avant de déplacer sa pièce attaquante, la capture (et donc le déplacement) est effectif. Il est évident que la pièce qui est touchée par un coude n’est pas prise en compte. Si l’adversaire en fait la remarque, il faut bien sûr appeler l’arbitre pour trancher.

L’adversaire peut, volontairement ou pas, avoir un comportement perturbant : taper ses doigts sur la table, bouger en permanence. On arrête la pendule et on appelle l’arbitre. On ne peut pas décider que la respiration est gênante !

A vérifier (France) : on peut demander à l’arbitre d’éloigner les spectateur envahissants. Un spectateur n’a aucun droit !

Proposer la nulle : on bouge, on note (avec le signe = à coté du coup) et on propose la nulle, et on appuie sur la pendule. Soit l’adversaire dit oui, soit il dit non, soit il continue à réfléchir et il joue un coup (pas poli, mais pas illégal !)

Votre adversaire réfléchit, puis au bout d’un certain temps propose la nulle. La réponse logique serait de dire : « Joue ton coup, et je considèrerai alors ta proposition » . Si l’adversaire répond que si il joue, il retire sa proposition de nulle, il faut appeler l’arbitre qui rappelle les procédures (sans suite ?). Mais admettons que vous acceptiez la nulle s’il joue son coup, et qu’il exécute un coup terrible : perte de sa dame alors que la position était équilibrée. Autre cas avec le même déroulé (l’adversaire réfléchit à son coup et propose la nulle avant de le jouer) : l’adversaire a la possibilité, qu’il ne remarque pas, d’un mat en 1 coup mais il estime probablement que sa position n’est pas terrible. Vous dites : « Ok joue ton coup et je te dis si j’accepte la nulle« . Sauf qu’entre deux il aperçoit le mat et le joue. Il est évident que si vous, vous voyez ce mat, il vaut mieux accepter tout de suite.

La tenue de feuille partie n’est pas toujours obligatoire en fin de partie selon les durées d’incréments. Avec moins de 30 secondes d’incrément, et dès qu’un des deux joueurs a moins de 5 minutes (ou moins de 5 mn et 01 s ? ), la notation n’est plus obligatoire. Il est recommandé de continuer à le faire malgré tout (+10 secondes d’incrément, par exemple, laisse le temps de le faire sans trop handicaper la réflexion). Pourquoi ? Car la tendance serait grande de jouer rapidement sachant qu’on n’a pas à écrire ses coups. Et jouer trop rapidement est souvent synonyme de mal jouer. Si on est en zeitnot, il est possible de cocher le coup (genre : petit trait devant le numéro du coup joué)

(conseil sur la feuille de partie : le double n’est pas toujours très lisible : pourquoi pas photographier l’original avant qu’il soit remis à l’arbitre, en faisant attention à ce que le portable remis en marche soit toutefois en mode avion ou silencieux)

En cas de triche (avérée !) : l’idéal serait bien évidemment de le faire dès qu’on s’en rend compte pendant la partie, ou éventuellement dès la fin de la partie si elle est perdue. Mais trois semaines plus tard… c’est trop tard !

Bien se dire que toute intervention manuelle tant sur les pièces, l’échiquier et la pendule, ne peut se faire que par l’arbitre !!!

La notion de « pièce touchée-pièce jouée » est une cause fréquente d’intervention de l’arbitre et cela arrive plus fréquemment qu’on ne l’imagine. Souvent, le joueur devra trouver la moins mauvaise case pour sa pièce touchée. Toutefois, s’il touche sa dame alors que son roi et en échec, et qu’en effet la dame est en mesure de parer l’échec, le joueur doit utiliser sa dame sur la case adéquate afin de soustraire son roi à cet échec. Au risque bien sûr de se la faire capturer selon la position !! S’il touche une pièce qui ne peut pas parer l’échec, c’est un coup illégal.

Pour abandonner : on le dit, ou on couche le roi sur l’échiquier (avec le cas limite du roi qui est touché alors qu’on va saisir une pièce adjacente par exemple, et que l’adversaire prend ça pour un abandon). Il arrive souvent que le joueur arrête la pendule en signe de résignation et tende la main pour conclure. Toutefois, rien ne prouve que l’adversaire vous propose finalement une nulle (sans le bon protocole, mais attention aux embrouilles) ! Tendre la main n’a aucune signification selon les règles, d’autant plus que le seul cas où on est amené à stopper l’horloge est quand on veut appeler l’arbitre

La triple répétition de position dont vous êtes conscient. Vous écrivez votre coup qui créé la triple répétition et vous arrêtez la pendule en disant à votre adversaire « j’ai écrit le coup que j’allais jouer, mais cela créé une triple répétition de position, donc pour moi c’est une nulle » L’adversaire peut admettre en effet que c’est une nulle ou contester et dans ce cas, on appelle l’arbitre. Pas franchement une règle d’arbitrage, mais s’il reste 25mn à un joueur et 5 à l’autre, le joueur qui a encore du temps devrait prendre son temps pour réfléchir.

Il faut essentiellement retenir que si quelque chose ne semble pas normal (à juste titre) : on arrête la pendule sur son propre temps et on appelle l’arbitre.

Les règles FIDE du jeu sont ici (2023). On peut aussi jeter un coup d’oeil sur ce questionnaire, ces précisions, et les réponses de l’arbitre Stéphane Escafre à des questions pratiques d’arbitrage. Si un arbitre FFE peut apporter son avis, ce sera avec grand plaisir que je compléterais cet article grâce à lui !

L’étude des parties de Grands Maitres


Dvorestky et Yusupov ont rédigé quelques chapitres dans un livre censé vous apprendre les secrets de l’entrainement. Beaucoup de considérations générales dans ce volume mais quand c’est dit par des références en la matière, cela prend tout de suite plus de valeur ! Cela en fait un livre un peu fourre-tout, mais après tout, pourquoi pas. Que nous disent Mark et Artur sur l’étude des parties de grands maitres ?

Il ne viendrait pas à l’esprit d’un poète de ne pas lire Rimbaud ou d’un peintre de ne pas étudier les Impressionnistes. Il en est de même aux échecs : il serait inconcevable de ne pas jeter un œil sur les parties de Capablanca, Tal ou Fischer. (encore qu’il me semble avoir lu quelque part qu’Artur insistait surtout sur l’analyse de nos parties plutôt que celles des autres, aussi forts joueurs soient-ils)

Les parties de ces joueurs de haut niveau permettent d’aborder des plans standards, des positions typiques, et des procédures particulières. Vous pourrez voir à quels moments ils estiment la position compliquée, comment ils réagissent face à l’adversité. Chaque joueur aura sa propre perception, il sera donc intéressant d’en étudier plusieurs.

La pratique des échecs en solitaire est une des méthodes possibles. On peut également aborder une position largement commentée dans la partie, et l’analyser soi-même pour la comparer ensuite au texte de référence.

Une autre option, plus sur le long terme, est de repérer une position particulière dans une de ces parties. Particulière car complexe, ou remarquable quant à la compréhension de celle-ci par le joueur, ou parce vous l’avez déjà rencontrée de façon approchante. Notez les commentaires et vos remarques. Dès que vous retrouvez ce genre de position, complétez ce thème avec la nouvelle position.

Quand un joueur dégrade sa position c’est souvent parce qu’il n’a pas été jusqu’au bout de son raisonnement, parce qu’il a mal abordé la position ou qu’il n’a pas pris la bonne décision. L’aptitude à approfondir sa réflexion, à développer une méthode rationnelle de planification, à déterminer l’origine des erreurs, et aussi à identifier sa créativité est au moins aussi important que toute la technique échiquéenne avec ses subtilités.

L’absence de vision sur un coup particulier, ou ne pas envisager une suite, reflète souvent d’autres défauts, comme le manque de confiance dans sa réflexion, Les joueurs sûrs d’eux mêmes et capables de jouer des coups agressifs sont souvent sur la voie de la réussite. Au contraire, des coup passifs (parfois pour se contenter d’une nulle) amènent souvent la perte de la partie face à un joueur expérimenté. En fait, les seuls moments où il convient de penser à la nulle sont ceux où l’adversaire vous le propose, ou en cas d’insuffisance matérielle (pour mater) par exemple. Un état d’esprit visant à chercher la nulle dès le départ n’aboutit pas toujours sur la perte de la partie, mais c’est un risque.

Psychologiquement, quand on recherche les coups défensifs, notre cerveau n’évaluera pas la possibilité d’un coup plus agressif même s’il est censé donné l’avantage. De la même façon, à force de défendre sur une position inférieure pendant plusieurs coups, un joueur se résignera à ne réfléchir que sur des coups défensifs, même s’il a des opportunités d’attaque.

Bref… il est également intéressant de se faire un stock de positions « annulantes » (autant parmi les parties de grands joueurs que parmi les nôtres) afin de les étudier

D’après Working your own and other’s players games dans : « Secrets of chess training« 

de Dvorestky et Yusupov

Tata Steel Masters 2021


Quel bilan après le ronde 8 et avant la dernière ligne droite qui commencera demain  :

Personnellement, je retiendrais qu’aux âmes bien nées, le talent n’attend pas le nombre des années !

Alireza Firouzja, 1er au classement provisoire, a 17 ans (elo 2749 et 18ème joueur mondial, avec une performance de 2861)

Et c’est un jeune de 18 ans qui a fait chuter Magnus Carlsen (champion du monde en titre, premier joueur mondial avec 2862 elo) : Andrey Esipenko, âgé de 19 ans (elo 2677 et 60ème joueur mondial, avec une performance de 2854).

Et Maxime ? Ce n’est pas le tournoi dans lequel il va briller, à moins de finir avec un sans faute. 10ème sur 14, contre-performance, soucis dans les sorties d’ouverture…

 

   

 

Vachier-Lagrave, Maxime vs Anton Guijarro, David


C’est dans le tournoi de Wijk aan Zee (c’est tout de même plus poétique que le Tata Steel Masters), et la quatrième ronde s’est soldée par une nulle dans toutes les parties.

A titre d’exemple, j’ai jeté un rapide coup d’œil sur la partie de Maxime contre Anton. 2784 contre 2679. L’analyse sur Lichess a montré pour les deux : 0 imprécision, 0 erreur, 0 gaffe. La perte moyenne a été de 0.055 pions chacun pour cette partie. L’avantage maximum concédé par le joueur espagnol a été de 0.8 points, et 0.5 points par MVL.

Waouh !

En gros, le graphe de l’analyse ressemble à ça :

Alors que quand je joue avec un adversaire de mon niveau :

 

 

Faut-il perdre ?


Je ne parle pas de ces joueurs qui se débrouillent pour obtenir un elo inférieur à leur réel niveau et qui jouent ensuite dans une catégorie inférieure qu’ils dominent…

Non, ma question est : à quel moment faut-il abandonner ?

Exemple : ces joueurs qui avec leur roi dépouillé face à R+D+T+P continuent malgré tout contre un adversaire qui n’est pas pressé par le temps. Certes un pat est possible, certes l’adversaire peut avoir une défaillance, certes.

Savoir abandonner, c’est savoir être poli, et, pourquoi pas, être respectueux (disons que c’est ma façon de voir et ce qui suit n’engage que moi).

« Eh toi, bouffon, zyva, G pas peur de ta dame et tes 3 pions, si j’veux des boloss comme toâ j’en mange tous les jour ! J’te jure, mon p’tit frère il est plus fort que toâ ! Wesh ! »

L’horloge, la pendule, ze clock.

Alors, définitivement non. être mené au temps (genre 2mn contre 30 mn) alors qu’aucun mat en trois coups ne se profile à l’horizon n’est pas une raison suffisante pour abandonner.

L’avantage matériel et ou positionnel

A partir de quel différence de matériel peut-on estimer que la partie est perdue et que l’abandon respecte l’adversaire et économise nos forces pour la prochaine partie d’un tournoi ?

Grosse question, et je n’ai pas la réponse. Il faut certainement prendre en compte la différence de niveau, la position…

Entre joueurs de moins de 1400-1500, les imprécisions existent pendant toute la partie, et tant qu’on n’arrive pas dans une finale « théorique » perdante, il est toujours intéressant de continuer.

L’imminence d’un mat

On va passer sur les finales élémentaires, ou sur le pion qui ne peut qu’obtenir sa promotion.

Mais parfois la position est catastrophique en milieu de partie, le roi est cerné de toute part, c’est Fort Alamo et la bataille de Camerone sur l’échiquier !

Là, justement, ne pas abandonner est malgré tout une marque de respect pour l’adversaire à qui on ne volera pas la plaisir du mat.  Et puis, perdu pour perdu, quel plaisir de rechercher au maximum le moyen de retarder la funeste conclusion.

L’option de la nulle

Ne pas la négliger ! Personne ne perd, personne ne gagne.

La triple répétition, l’échec perpétuel, la recherche du pat sont des techniques qu’il ne faut pas oublier et abandonner trop tôt sans les envisager serait dommage.

Faut-il accepter une proposition de nulle, afin de ne pas perdre ?

Si vous courez après un titre, un classement, et que vous êtes « joueur », je serais tenté de dire non ! Sauf si vous estimez votre position catastrophique : sautez sur cette offre.

Un article sur la nulle (enfin… le titre est tout de même No Draw !) : ici, pour la version traduite (sachant qu’il vous faudra remplacer tirage par nulle)

Vous en pensez quoi ?