Parfois, tenter de s’améliorer ne nécessite pas d’en faire des tonnes, mais de s’attaquer aux vrais problèmes
Dan Heisman
1. Ne pas appliquer un processus de réflexion correct.
Il est assez facile d’apprendre les règles du jeu. Mais procéder par ordre lors de la réflexion n’est pas intuitif.
Résumons.
A) Pour chaque coup candidat, rechercher les échecs/captures/menaces en riposte de votre adversaire. Si une de ses réponses vous met en danger, il faut rejeter ce coup candidat.
B) Procéder jusqu’à ce qu’on estime la position stable. Analyser la position.
c) Répéter le point A et B jusqu’à obtenir une position satisfaisante. La suite de coups calculés s’appelle la variante principale.
D) Les points A, B, C doivent être appliqués sur chaque coup tant que le temps vous le permet. Le moindre manquement risque de vous faire perdre la partie. Vous pouvez notamment vous en dispenser quand il y a une suite forcée, quand vous êtes en finale D+R contre R. Appliquer strictement le point D fait gagner plusieurs centaines de points Elo.
N’essayez pas de justifier votre coup, mais tentez toujours de trouver le meilleur. En tout cas, ne jamais jouer en se disant « Ça devrait le faire…. »
2. Ne pas appliquer les motifs tactiques de base
Cela implique aussi le fait de ne pas être précis dans les échanges (cf point 10). Les motifs de base : le clouage, la fourchette, la double menace, la suppression du défenseur, etc. La reconnaissante immédiate de ces motifs s’obtient par la répétition. Toutefois cet apprentissage prend du temps. Il ne s’agit pas d’un simple état d’esprit ! Mais une progression de 100-200 points Elo est au bout de la route.
Pratiquer des exercices tactiques avancés nécessite de connaitre les motifs de base si on veut progresser.
3. Mal utiliser son temps.
Cette notion est liée au point 1, car bien évaluer les menaces et les réponses aux coups candidats prend du temps. Savoir s’il faut sacrifier une dame va demander plus de temps que de décider quel cavalier développer en premier. Les finales ne doivent pas être sacrifiées. Sinon cela transformera une position gagnante en position nulle, puis en partie perdue ! En finale, il n’y a aura pas trop d’occasions de rattraper un mauvais coup.
Pour ceux qui n’utilisent pas tout leur temps, bien appliquer le point 1 devrait corriger ce problème. Inversement, en étant trop lent, il faudra calquer sa réflexion sur celle de son adversaire et régulièrement vérifier la pendule (à chaque coup en fait)
4. Ne pas jouer assez de parties lentes.
A l’heure où les bullets se développent, et où des parties de 30mn sont déjà trop longues sur des jeux en ligne, il est nécessaire de revoir cet aspect si on désire progresser. Même 30 mn ne permettent pas de mettre en place un bon processus de réflexion.
Il est possible de rejoindre des groupes de joueurs de parties lentes en ligne, de jouer en club, et surtout de pratiquer des tournois. Jouer en tournoi dépend de votre emploi du temps mais est nécessaire pour mettre en application ce que vous avez appris et corriger ce qui ne fonctionne pas.
100 parties lentes par an (1h30) devrait vous faire progresser (soit 16 tournois de 6 parties, donc au moins un tournoi par mois !).
En tout cas 100 parties lentes de 1h30 ne valent pas 300 parties de 30mn.
5. Ne pas hiérarchiser des principes de jeu
Évaluer une position permet de définir qui est mieux (un peu, beaucoup) et pourquoi. On ne va pas choisir le coup A si on pense que la position qui en découle est moins bonne que la position provoquée par le coup B, même si la position B est réellement meilleure. Une erreur de jugement peut vous empêcher de capturer une pièce en affaiblissant votre roque, alors qu’une analyse correcte de votre position montre que celle-ci est à votre avantage. Attention à ne pas sous-estimer la puissance de la paire de fou ou à bien comprendre la valeur F+C contre T+P.
Afin de bien appliquer ces principes, il est nécessaire de lire des parties de grands joueurs. Se méfier des livres de stratégie, parfois mal interprétés par des joueurs débutant, qui entrainent une sous ou une sur estimation de certaines faiblesses par le joueur.
Évaluer une position ne consiste pas simplement à comparer le matériel et à lister les faiblesses et points fort de chaque camp. L’activité ds pièces est tout aussi importante.
Exercice : prendre une position et la donner à un programme. Après réflexion, comparer son évaluation avec celle de l’ordinateur( =, +/-, +/=)
6. Attacher trop d’importance à son elo.
Bien se persuader que le niveau elo n’est qu’un calcul mathématique. S’améliorer consiste à ajouter des points positifs et à soustraire des points négatifs. Une partie est mauvaise quand on en tire aucune expérience, et non pas quand on a perdu. Chaque partie perdue doit permettre de détecter une faille qu’on pourra corriger. Afin de progresser, et ne pas se décourager non plus, 60-70% de vos adversaires devraient être supérieurs à votre niveau.
7. Ne pas prendre conseils auprès de joueurs expérimentés.
Le corollaire : répéter inlassablement les mêmes erreurs.
Le passage par un coach/instructeur est utile. L’analyse de vos parties après avoir affronté un fort joueur et soumettre vos parties à un ordinateur après les avoir analysées sont un bon moyen de progresser.
8. Accorder trop d’importance à l’apprentissage des ouvertures.
Au lieu d’apprendre par cœur certaines lignes d’ouvertures bien particulières, il est préférable de connaitre et d’appliquer correctement les principes généraux des ouvertures et d’éviter les erreurs d’ouverture. Lancer une attaque avant que toutes les pièces soient développées est une erreur courante d’un débutant. Le principe de ne pas déplacer une pièce une deuxième fois avant d’en avoir bougé une autre une première fois devrait être écrit en gros sur la glace de votre salle de bain ! Maintenir toutes vos pièces au maximum de leur activité est un autre principe fondamental. Ne pas roquer au bon moment, se créer des cases faibles, ne pas utiliser des mouvements de rupture pour donner de la place à ses pièces…. autant de détails à régler avant de connaitre par cœur la dernière nouveauté d’une ouverture jouée dans un grand tournoi.
A minima : apprendre les 8-12 premiers coups de une à deux variantes principales (Nunn’s Chess Opening, Chessbase on line). Cela prend quelques heures. Se pencher sur les pièges afin de les éviter. Après chaque partie, rechercher le coup qui vous a fait sortir de l’ouverture. Si c’est votre adversaire qui n’a pas joué le bon coup, vérifier comment vous avez réagi. De partie en partie, vous étendrez vos compétences par l’expérience. Ne pas s’attendre à un résultat fulgurant puisque l’amélioration ne pourra se faire que sur plusieurs centaines de parties.
Tabyah : Une position dans l’ouverture d’un jeu qui survient après une séquence de mouvements très standardisée et à partir de laquelle les joueurs ont la possibilité d’ouvrir de nombreuses variantes.
9. Ne pas s’imprégner des parties des grands joueurs.
Les livres tactiques sont probablement les plus utilisés (Gagner avec les Blancs, la tactique pour les nuls, les trois positions à connaitre, etc.), mais peu de joueurs ont jeté un coup d’œil sur les parties de Spassky ou de Bent Larsen. Pourtant cela éviterait de commettre des erreurs telles que déplacer la même pièces plusieurs fois, créer des menaces fantômes, ou attaquer prématurément.
Chernev est une bonne source de parties commentées. Il serait logique de lire des recueils de parties par ordre chronologiques : d’abord Steinitz, puis Cabablanca, puis le tournoi de Zürich, puis Fisher, etc. Il s’agit vraiment de développer la partie : ne pas y passer une semaine et on peut sauter la grosse analyse de certaines variantes.
10. Ne pas savoir calculer le résultat d’un échange.
Oubliez les valeurs usuelles des pièces. Retenez que la dame vaut 9,75 pions, la tour 5 pions, le cavalier et le fou valent 3,25 pions, et que la possession de la paire de fous (quand l’adversaire l’a perdue) vaut 0,5 pions. Avec ce calcul on se rend compte qu’un fou et un cavalier ne valent pas une tour et un pion. Pensez qu’un roi a une valeur combattante de 4 pions. Ne pas l’impliquer dans une finale serait une grave erreur. Négliger ces valeurs peut vous couter 50-100 points elo.
Inversement, il ne faut pas se focaliser uniquement sur le matériel au détriment de l’activité des pièces, de leur coordination, de la sécurité du roi.
D’après « The 10 biggest roadblocks to improvement »
Novice Nook 23 – Dan Heisman