Diagnostic tactique


Faites vous un petit tableau Excel (ou sur une simple feuille de papier, ou même dans votre journal de travail) et mettez un petit trait devant une des catégories suivantes à chaque fois que vous ratez un exercice tactique :

  • Mauvaise visualisation : qui vous empêche d’avoir un calcul exact. Comme une pièce adverse clouée sans tenir compte de cet avantage, ou lors de positions compliquées avec beaucoup de pièces dans un secteur de l’échiquier rendant ainsi la visualisation plus difficile.
  • Pas de recherche de tous les échecs possibles lors de la réflexion : et ceci pendant 1.5 coups minimum. En pratique, on peut se contenter de prendre en compte que le premier coup pour poser un trait. Sachant que si on n’envisage pas un échec comme réponse de l’adversaire, c’est peut être simplement dû à un soucis de visualisation ou une mauvaise prise en compte de toutes les pièces de l’échiquier.
  • Pas de recherche de toutes les captures possibles lors de la réflexion : négliger aucune capture de pièce. Un simple pion capturé permet de laisser passer une tour victorieuse ou ouvre une diagonale vers le roque. Ne pas négliger non plus un sacrifice en se disant : « Ah bah.. non… là si je perd ma pièce, ça va plus » sans avoir réfléchit a minima 1.5 coups.
  • Pas de recherche de toutes les menaces possibles lors de la réflexion : un échec au roi, c’est une menace. Reste, après les calculs des captures, à envisager les menaces sur la dame, la tour, le cavalier, le fou…
  • N’aborde pas les coups candidats dans l’ordre échec-capture-menace : nécessite un peu d’introspection, mais afin d’optimiser le temps lors d’une partie, il semble essentiel de bien aborder la réflexion dans cet ordre.
  • Quiescence : on pense que la position est gagnante ou perdante, alors que des échanges sont encore possibles ou que des menaces sérieuses existent encore (d’un coté comme de l’autre).
  • Ne réfléchit pas au minimum jusqu’au 1.5 coup suivant : plutôt de l’impatience en fait ! on voit une capture d’une pièce non protégée mais la réponse adverse entraine un échec intermédiaire dévastateur.
  • Pas de prise en compte de toutes les pièces de l’échiquier : normal quand on aborde un problème (contrairement à une partie pendant laquelle la connaissance de toutes les pièces sur l’échiquier est intuitive et progressive, coup après coup). Bien penser avant de réfléchir sur un exercice tactique à analyse la position : équilibre matériel, pions passés, sécurité des rois, avantages stratégiques, activité des pièces… enfin bref, la routine quoi ! Lors d’un exercice avec une finale de pions, bien regarder qui doit jouer en premier et bien s’imprégner du sens du jeu.
  • Mauvais calcul : mélange en fait d’un défaut de visualisation (empêchant souvent de réfléchir au delà de 2 à 3 coups, même sur des coups forcés), de mauvaise prise en compte de toutes les pièces de l’échiquier, de quiescence, d’une non considération d’un échec intermédiaire.
  • N’envisage pas une position idéale : pas une erreur en soi, mais parfois un schéma tactique s’impose et on ne recherche pas à l’atteindre.

Liste non exhaustive, mais je pense qu’elle regroupe l’essentiel des défauts. Vous pouvez en rajouter d’autre ou en retirer.

Au fur et à mesure de vos exercices tactiques quotidiens, vous pourrez ainsi dresser le portrait robot de vos erreurs de réflexion. Attendez toutefois d’avoir une bonne centaines de problèmes ratés pour tirer des conclusions. Admettons que vous résolviez 70 % de vos problèmes, si vous en pratiquez 100 par jour, vous mettrez 3-4 jours à compléter votre tableau diagnostique (et bien sûr 6 à 8 jours si vous vous basez sur 50 problèmes quotidiens).

Vous pouvez cocher plusieurs catégories en même temps. Une position compliquée altère votre visualisation et votre cerveau s’affole sans aborder la situation sereinement (vous vous concentrez sur la position compliquée sans voir la tour de l’autre côté de l’échiquier qui pourrait débloquer le problème). Dans ce cas cochez le défaut de visualisation, la non-considération de tout l’échiquier, et par exemple le fait de ne pas avoir envisagé tous les échecs. Trois traits.

Si cette méthodologie est un peu lourde, elle a au moins l’avantage de bien faire prendre conscience des erreurs de base. Pour progressivement appliquer tout ça inconsciemment lors d’une partie. N’hésitez pas à vous replonger dans les quelques posts sur les processus de réflexion.

 

Test pour joueurs sérieux


J’aime bien les idées de Stjepan, l’animateur de la chaine vidéo Hanging Pawns. Ici, il nous donne une idée de test pour joueurs sérieux (je me demande d’ailleurs s’il ne veut pas dire motivé !). Méthode mesurable, efficace, difficile et chronophage précise-t-il.

Test en 5 étapes, à partir de 100 positions issues de parties jouées. Vous êtes avec les blancs et vous devez trouver le 20ème coup. Écrivez-le sur le papier, éventuellement avec vos remarques.

  1. Examen de la position pendant 30 secondes. Écrire son coup. On travaille l’intuition, donc ne pas se soucier de la qualité du coup. Il y aura inévitablement des erreurs.
  2. Vous relancez votre chronomètre et réfléchissez en profondeur pendant 3 minutes. Stjepan précise qu’il n’a pas beaucoup plus de réussite en 3 mn (50%) qu’en 30 secondes. (45%). 3 minutes : c’est en moyenne le temps dont nous disposons sur des parties longues pour réfléchir sur un coup. Autant dire, et je ne suis pas loin de penser comme lui, que pour l’essentiel, le bon coup est trouvé avec notre intuition (bref : 30 secondes pour trouver un coup, et 2’30 pour vérifier que ce n’est pas une grosse erreur ?) Cette étape permet de développer les compétences stratégiques et positionnelles.
  3. Étape des 10 minutes : réflexion en profondeur. 10 minutes est probablement encore insuffisant pour bien saisir toutes les finesses de la position, mais l’essentiel aura été analysé.
  4. Enfin vous soumettez la position (enfin… les 100 positions !) à un moteur d’échecs et vous notez ses 3 meilleurs résultats. Comparez avec vos résultats des 3 précédentes étapes.
  5. L’étape écrite : à partir de vos résultats sur l’étape 3, notez ce que vous avez compris, ou pas, verbalisez votre échec ou votre réussite. « Pourquoi est-ce que je n’ai pas trouvé un des trois meilleurs coups de l’ordinateur ?« 

Chess Games est une piste pour avoir 100 positions, choisies dans un même tournoi pour des raisons de commodité. L’intérêt est que vous pouvez déplacer les pièces et vous arrêter juste au 19ème coup des noirs, sans prendre connaissance de la réponse des blancs.

La solution vous montrera que vous avez attaqué au lieu de défendre, ou le contraire, vous repérerez des schémas positionnels qui vous auront échappés. Stjepan a augmenté son  score de 15 % au 3eme test (j’imagine avec trois sets différents de parties ?) Cela lui a nécessité 24h au total. Il préconise de pratiquer d’abord l’étape 1 avec les 100 positions, puis faire ensuite l’étape 2, etc. La résolution sur l’écran permet de gagner du temps !

Les moyens de se tester afin de trouver ses failles et les corriger sont nombreux. Celui-ci en vaut certainement d’autres mais il mérite qu’on s’y attarde. Selon votre niveau, il est possible à mon avis de réduire les 100 positions à 10 par exemple, ou à 50. Et si Stjepan y consacre 1 semaine pour tout faire, un joueur amateur peut réaliser ce test sur 2 à 3 semaines ou que sur 50 positions, tout en tirant probablement profit de cette méthode.

Attention avec le moteur d’analyse. Sauf sur certains coups évidents, les trois meilleurs coups ne seront pas nécessairement les mêmes d’un moteur à l’autre. Ensuite, sur certaines positions un peu complexes, l’ordre des meilleurs coups peut changer au bout de quelques minutes d’analyse. Reste le cas particulier où seul le premier coup procure un avantage (genre  +2.45). Si les deux suivant sont  à -0.75 et -1.15, ne pas crier victoire si votre réflexion vous amène sur un de ceux-ci !

 

Sauter la barrière.


S’il fallait résumer les notions des Big Five de Dan Heisman (un des textes fondateurs de la philosophie heismanienne), il faudrait retenir :

  • La gestion du temps : jouer rapidement dans des parties lentes vous empêche de trouver le bon coup, et jouer trop lentement vous amène à prendre de mauvaises décisions ultérieurement par faute de temps. Un mauvais processus de réflexion amène à jouer trop vite. Ne pas optimiser sa réflexion fait perdre du temps.

Exemple pour une pièce en prise : quand plusieurs possibilités existent pour empêcher une capture, il faudra bien évaluer toutes les options (prendre la pièce attaquante, intercepter, déplacer, contre attaquer), et lorsque le tri des coups candidats aura été fait, il faudra se demander si le coup analysé peut faire face à un échec, une capture ou à une menace (dans cet ordre). Enfin, se demander quelle est la position satisfaisante qui en résulte. C’est réducteur, mais c’est un passage obligé.

  • Les tactiques de base : s’assurer de la sécurité de chaque pièce avant d’en jouer une est un minimum. La deuxième étape consiste à s’assurer de la sécurité de toutes les pièces avant de jouer son coup.
  • L’activité des pièces : au football, c’est 11 joueurs contre 11, et il ne viendrait jamais à l’idée de quiconque de s’aligner à 9 contre 11 ! (Même le PSG ne le fait pas…). Vous voulez exploiter un avant-poste avec un cavalier ? Attendez que toutes vos pièces puissent supporter le déplacement vers cette case forte.

Qu’un seul de ces trois points soit défaillant, et c’est le niveau général qui va stagner. Vos performances seront au niveau de la plus faible de vos compétences. Se soustraire ou ignorer les principes de base rend illusoire toute tentative d’amélioration dans d’autres secteurs du jeu. Certes, corriger de mauvaises habitudes ou acquérir ces notions de bases sont parfois longues et/ou rébarbatives, mais une progression nette est au bout de la route.

La connaissance théorique des ouvertures est réellement secondaire pour la progression. Pour les débutants, le simple respect de ce principe est suffisant :

Dans une ouverture, déplacer chaque pièce une fois avant de les bouger une deuxième fois, sauf si un motif tactique le permet.

D’après The Three Show-Stoppers

(A guide for chess improvement – Dan Heisman)

 

Show Stopper : Action, condition, événement ou problème suffisamment grave pour interrompre une activité, un programme ou un processus jusqu’à sa résolution.

 

 

 

Comment trouver rapidement un (bon) coup.


Rien à voir avec des conseils pour briller sur Meetic.

Igor Smirnov nous donne quelques indications qui tombent sous le signe du bon sens, mais encore faut-il y penser. Nous sommes dans la gestion du temps et non pas sur du calcul.

Lors d’une partie, chaque joueur a un capital temps qu’il faut utiliser au mieux. Le souci est qu’il y a beaucoup d’idées à appliquer en trois minutes (tactiques, stratégies, principes, règles, stress…)

1) Évaluer le temps par coup. En moyenne, une partie comprend 40 coups. Une partie de 2h donne 3 mn par coup. Même chose avec 90mn+30s.

2) Savoir reconnaitre les moments où il faut prendre son temps et les moments où il faut jouer rapidement.

  • Jouer rapidement lors de l’ouverture tout en respectant ses principes généraux (développer les pièces, contrôler le centre, mettre le roi en sécurité, etc.). Il est préférable de jouer des coups moyens rapides lors de l’ouverture plutôt que d’être en retard et de faire une erreur en milieu de partie.
  • A la fin de l’ouverture, prendre le temps d’établir un plan. Celui-ci permettra d’orienter plus facilement ses prochains coups. Sans plan, les coups qui suivront l’ouverture seront plus longs à trouver.
  • Le calcul de variantes s’effectue dans des positions tactiques alors que les grands principes s’appliquent dans des positions stratégiques. Une position tactique se reconnait lorsque des prises sont envisageables (pas de suites forcées ou de motifs tactiques). Dans une position stratégique, il est temps de penser avant-poste, colonne, etc. Il faut commencer à calculer lorsque des pièces sont en contact ou qu’on envisage une telle situation.
  • Quand on sent qu’on peut obtenir un avantage ou qu’on peut le perdre, il faut prendre tout le temps nécessaire raisonnable.

3) Regarder le temps à chaque fois qu’on appuie sur le bouton de l’horloge. Il est facile de sous-estimer le temps consacré à la réflexion et de finalement regarder l’horloge seulement quand on est en zeitnot. Avoir constamment conscience du temps utilisé permet de mieux le gérer et d’être au même niveau que son adversaire.

4) Utiliser le temps de l’adversaire pour réfléchir sur la position (stratégie, quelques coups tactiques envisageable, sans se prendre la tête). Évident, mais pas toujours appliqué.

5) Si vous êtes en retard au temps :

  • Simplifier la position en échangeant tout ce qui est échangeable afin de réduire les risques d’erreur.
  • Éviter les complications tactiques
  • Dans les parties avec incrément, accumuler du temps avant d’entreprendre une suite compliquée en jouant rapidement des coups simples sans conséquence (comme déplacer un roi derrière son roque !)

A revoir  : les conseils de Dan Heisman.

 

 

 

15 minutes, 1 fois par jour.


Cet exercice a été proposé par Marc Dvorestky et exposé sur Chess.com. Je traduis comme je peux.

Travaillez sur un échiquier sur lequel vous disposerez les pièces. Cela vous rapprochera le plus possible des conditions réelles de jeu. 
Réglez un chronomètre sur 15 minutes.
L’objectif est de résoudre 5 problèmes en 15 minutes, soit 3 minutes par exercice en moyenne.
Chaque fois que vous en ratez un, soustrayez 5 minutes de votre temps restant (vous avez émis une fausse hypothèse au bout de 3 minutes pour le premier exercice, il devrait donc vous rester 7 minutes pour les quatre autres problèmes.)
Si vous ratez deux exercices, vous aurez 10 minutes en moins. Il ne faut donc pas rater plus de deux exercices. Le but n’est pas de résoudre tous les exercices, mais bien de gérer son temps, et de
rester concentré. Ce n’est donc pas grave de ne pas tout résoudre pour réussir l’exercice (tout comme dans une partie on ne trouve pas le bon coup à chaque fois) .
Si vous résolvez les trois premiers problèmes et qu’il vous reste plus de 10 minutes à jouer, vous avez réussi l’exercice et les deux autres autres problèmes pourront être reportés pour le prochain exercice. De même, s’il vous reste plus de cinq minutes pour votre dernier problème, il est inutile de le résoudre pour ce test de 15 minutes et il peut être inclus dans les 5 autres problèmes si vous recommencez.
Le but, encore une fois, est de battre l’horloge, pas toutes les positions. (Mais comment interpréter la session si on rate le dernier exercice alors qu’il reste 2 mn ? Hein, t’en penses quoi, Marc ?)

On peut admettre que l’exercice est bon quand le premier coup est correct.

Quand il reste peu de temps, l’intuition prend le dessus, comme dans la vrai vie !

Les exercices devront être choisis de force croissante et adaptés à votre niveau, sans indication (telle que mat en trois coup, ou les blancs jouent pour l’avantage), et avec des thèmes variés. L’ajustement des problèmes est délicat mais faisable. On peut estimer que si les 5 exercices sont réussis en 10 à 15 minutes, c’est qu’ils sont trop faciles.

Il est possible de les choisir parmi ces livres :

  • Chess Training Pocket Book d’Alburt
  • John Nunn : Puzzle Book
  • Volokitin : Perfect Your Chess
  • Ray Cheng : Practical chess exercices.

Rien ne vous empêche non plus de vous imposer 50 pompes/abdos si l’entrainement de 15 minutes est raté…

A mon avis il est possible d’utiliser Chesstempo, Lichess ou Ct-Art pour le choix des problèmes (mais toujours en plaçant les pièces sur un échiquier). Dans les deux premiers cas, le niveau sera automatiquement adapté en fonction de vos succès ou échecs. Et dans le troisième, vous aurez la possibilité de faire les tests en choisissant vous-même le niveau (mais en optant pour les exercices de type généraliste, pas orientés pour une particularité tactique)

J’ai essayé sans les pompes. Il est vrai que le décompte de 5 minutes apporte pas mal de piment. Et cela ne donne pas la même saveur que de se dire : « Voilà, j’ai trois minutes pour résoudre un problème. »

Après, certain(e)s préfèreront se poser pendant 1 heure sur un exercice, ou apporter la solution à coup sûr. Mais lors d’une partie dans un tournoi, cette dernière option est impossible et en effet, ce qui est proposé par Dvorestky se rapproche des conditions réelles.

 

C’est l’été. donc les vacances. On se retrouve à la rentrée  ?

Tournoyez bien et que Philidor vous inspire !