…qui recherche les déséquilibres !!!
Un des avantages d’une liseuse est de pouvoir lire un extrait de livre (parfois l’introduction, parfois cela va jusqu’au premier chapitre). J’ai pu tester « Mastering Chess Logic » de Joshua Sheng (GMI, 2454 elo) et Guannan Song (Maitre FIDE, 2151 elo), sorti en 2021. Sur Amazon, une critique dézingue complètement le bouquin (« Y’a mieux« , « ce n’est pas un livre sur la logique mais sur la stratégie« , etc.), mais la note globale est correcte.
Aussi bizarre que cela puisse paraitre, le premier chapitre est consacré aux déséquilibres (rien à voir avec de la logique en effet) !! Les auteurs réduisent la liste des déséquilibres de Jeremy Silman à quatre éléments (c’est déjà plus simple) : matériel, activité des pièces, structure de pions, et espace. En voici un résumé.
MATÉRIEL
- L’avantage matériel s’exprime plus facilement en fin de partie quand le joueur défavorisé, par défaut de matériel, n’a plus beaucoup de contre-jeu.
- On peut considérer le gain matériel comme un des éléments le plus déterminant afin de gagner une partie. Mais le fait de le considérer simplement comme un déséquilibre permet d’élargir les options du jeu sans s’y accrocher comme une bouée de sauvetage.
- Une pièce peut être sacrifiée pour détériorer une structure de pions.
- On peut « rendre » un peu de matériel : afin de gagner en activité, modifier une structure de pion ou gagner de l’espace. Tout est question d’équilibre.
ACTIVITÉ
- Un des concepts le plus fréquemment abordé sur ce thème est celui de la supériorité d’une pièce mineure sur une autre : le cavalier sur un avant-poste solide sera supérieur au mauvais fou coincé derrière ses pions centraux.
- Le mauvais fou est un moins mauvais fou s’il est passé devant ses pions centraux.
- Les cavaliers sont plus actifs que les fous sur des positions fermées, alors que l’action à longue distance des fous les rend plus utiles sur des positions ouvertes.
- Bien positionné, un fou sur une case blanche peut, éventuellement avec l’aide d’un pion ou deux pions, bloquer l’activité d’un cavalier qui est sur une case noire.
- La possession de la paire de fous devient une arme redoutable quand elle est activée.
- Le cavalier, de part son déplacement particulier, le rend très efficace pour bloquer un pion passé (en se mettant devant). Il a la possibilité de contrôler de « l’autre côté du pion », éventuellement protégé par un autre pion. Un fou, par contre, sera plus passif.
- Même lorsqu’ils se protègent mutuellement, deux cavalier n’ont pas cette synergie de la paire de fous. Ainsi, une tour contre deux cavaliers sera parfois supérieure.
- Les tours tireront toute leur force sur une colonne ouverte contrôlée qui leur permettra d’accéder au camp adverse.
- Ensuite, le premier qui, avec sa tour, contrôle la rangée de départ des pions de l’adversaire a souvent un avantage tangible.
- Le transfert de tour qui consiste a amener une tour devant ses pions, est également une arme redoutable quand il s’effectue en face du roque adverse.
- Si la 2eme rangée pour les blancs est libre, y poser une tour devient une arme offensive ou défensive très puissante pour les blancs.
- La position centrale d’une dame bien protégée est un argument qu’il ne faut pas négliger dans son arsenal offensif.
AMÉLIORATION DES PIÈCES
- Quand on le peut, perdre 2 à 3 coups pour mettre un cavalier sur un avant-poste est souvent utile. Une fois sur cet avant-poste, le joueur devra anticiper les actions de l’adversaire visant à le déloger.
- L’ouverture d’une diagonale est essentielle pour l’activité d’un fou. Tout comme il est souvent utile de déplacer son cavalier pour aller le mettre sur un avant-poste, il est utile également de déplacer son fou pour le mettre sur une bonne diagonale.
- Sur une colonne avec les tours de chaque camp à chaque bout, il ne faut pas céder à la tentation de les échanger. Au contraire, il faudra trouver tout moyen pour renforcer le contrôle sur cette colonne en empêchant éventuellement l’adversaire de le faire (interposer une pièce entre les tours par exemple). S’il n’y a pas de colonne ouverte ou semi-ouverte utile, on peut envisager de « sacrifier » une tour peu utile/active afin d’augmenter l’activité des pièces mineures. Ne pas oublier qu’une tour est plus efficace en poussant son pion passé.
CHAINE DE PIONS
- La notion la plus facile à retenir est probablement le pion passé. A noter que c’est la seule structure de pions qui ne peut absolument pas être être modifiée par d’autres pions, quel soit l’avantage matériel ! Le pion passé éloigné est une arme redoutable.
- Plus fort que le pion passé : le pion passé protégé ! Probablement supérieur au pion passé car un roi seul ne peut rien contre lui (contrairement au pion passé qu’il peut contrer, même si cela peut lui couter la partie malgré tout).
- Une chaine de pions passés connectés est aussi une arme puissante.
- Des pions blancs sur d4 et e4 sont très puissants si les noirs négligent le centre (idem pour d5 et e5 en faveur des noirs).
- 3 catégories de mini-structures qui n’ont pas bonne réputation : les pions doublés, le pion arriéré et le pion isolé. Elles ont toutes des avantages et des inconvénients qu’il convient d’étudier.
- Selon le contexte, il faudra se débarrasser de ces structures souvent pénalisantes en fin de partie : dédoubler des pions doublés, échanger un pion isolé avec un pion adverse d’une colonne voisine.
- Un pion isolé capable d’avancer d’une case (tel que d4-d5 pour le blancs) avec l’aide des autres pièces est souvent un catalyseur de victoire.
- Après avoir acquis ces notions de mini-structure, il est utile d’aborder la notion d’ilots de pions : moins on en a, mieux c’est. Surtout en finale.
- A l’étage au dessus de ces structures simples, il y a les chaines de pions. L’exemple qui illustre bien ceci est la structure obtenue avec la variante d’avance de la défense française. Une chaine de pions est censée être attaquée à sa base.
- Enfin, il est souvent sage d’opter pour des attaques vers la direction donnée par la chaine de pions. L’avantage d’espace vers cette zone est souvent déterminant.
ESPACE
- L’espace est cette zone plus ou moins délimitée en arrière des pions. Celui qui en a le plus, a plus de liberté pour bouger ses pièces.
- Le déficit d’espace amène souvent des échanges de la part du camp défavorisé (que l’adversaire tentera de refuser !)
- L’espace n’est qu’un déséquilibre comme un autre. Trop d’espace nécessite un bon contrôle des lignes arrières si on ne veut pas être envahi.
Chacun de ces points est détaillé et illustré par un diagramme, un seul, mais bien choisi. Pas besoin de 1000 exemples avec des variantes de 15 lignes pour montrer tout ça. Voilà un sympathique résumé stratégique que chacun pourra travailler afin d’évaluer au mieux ses positions ou orienter le sens de la partie. Petit plus : des exercices en fin de chapitre (19 pour cet extrait, peut-être plus sur le livre).