Un peu avant une récente partie d’interclubs, j’avais fait la remarque à mes partenaires qu’à petit niveau nous avions souvent tendance à pratiquer des échanges au lieu de maintenir une tension. Trois heures plus tard, j’échangeais des tours sans raison valable, et 3h20 plus tard je proposais à mon adversaire un échange de dames inutile et fatidique (pour moi) ! Repérer des erreurs c’est bien, les éviter c’est mieux.
En utilisant l’idée d’Avetik, j’ai établi cette liste à partir de mes récents défauts et dernières erreurs (en italique, les explications) :
- anticiper en priorité les déplacements des cavaliers, sur 2 (deux) coups : deux précautions valent mieux qu’une. La future fourchette est plus facile à parer deux coups avant, que juste avant quand c’est quasi imparable. Le corollaire : lorsqu’on est à portée de tir d’un cavalier, attention aux cases occupées par nos pièces afin de ne pas tenter un cavalier adverse surtout avec un roi et/ou une dame à côté.
- lors d’une incertitude entre deux coups qui semblent équivalents en terme d’avantage, choisir celui qui « questionne » l’adversaire : si cela semble évident à tête reposée sans stress, lorsqu’on est sous la pression et que, par exemple, une pièce est menacée, on a peut-être plutôt tendance à choisir un coup défensif ou le retrait de la pièce attaquée, laissant l’initiative à l’adversaire. Mais tout coup qui force l’adversaire à bouger une de ses pièces devrait être considéré.
- ne pas se laisser abuser par des menaces fantômes (visualisation) : j’ai l’impression que ces menaces fantômes sont souvent liées à une mauvaise visualisation et à une profondeur insuffisante de calcul (1,5 coups). Par défaut, cela amène à jouer un coup prophylactique inutile.
- réfléchir sur 1,5 coups au minimum systématiquement (cf les menaces fantômes au point précédent) : Ne pas envisager un coup candidat car on se dit « Ah non, je ne vais pas jouer ça car sinon mon adversaire va jouer ça », sans vérifier si la réponse adverse est viable, nous prive de coups intéressants.
- quand on peut mettre en échec, capturer ou menacer, rechercher tous les coups permettant de le faire : il peut arriver que plusieurs options existent quand, par exemple, il s’agit de prendre une pièce ou de poser un échec. L’établissement des coups candidats amène sur deux possibilités qui sont évaluées, mais aucune des deux ne semble valable et on passe à autre chose de l’autre côté de l’échiquier. Sauf qu’il n’y avait pas que deux possibilités et que notre cerveau n’a pas considéré la troisième qui était la bonne solution. Voir large plutôt que loin. En étendant cette notion : quand on désire capturer une pièce, vérifier aussi s’il n’y a pas possibilité de capturer son défenseur.
- Maintenir une tension au lieu d’échanger : je cloue un cavalier avec mon fou, et hop, le coup suivant je capture avec mon fou le cavalier pourtant protégé. Deux tours face à face à chaque extrémité d’une colonne ? Hop j’échange ! Et bien non… il faut, selon la position, plutôt maintenir une tension. Double, quadruple vérification aussi quand il s’agit d’échanger les dames : bien en assumer les conséquences parfois fatidiques. Cette tension amène des faiblesses chez l’adversaire pour peu que la position soit à notre avantage, il s’agira alors de rechercher une autre faiblesse !)
On peut établir une liste d’erreurs plutôt tactiques ou positionnelles (sur tel coup répondre avec la dame en f2, ou sur tel schéma de mat d’abord positionner le cavalier). Mais à mon avis, il est probablement plus important de comprendre pourquoi on a fait une erreur (pourquoi on n’a pas repris avec la dame en f2 ou pourquoi on n’a pas positionné le cavalier en premier), et de détecter le mécanisme qui n’a pas fonctionné. Ce n’est pas une check-list qu’il s’agit de mettre en place, encore que cela mériterait un développement à part, mais il s’agit bien de tirer une leçon d’erreurs commises afin de ne pas les reproduire.
Bon, j’en fais quoi de cette liste ? Mon prochain tournoi est dans 4 mois !
On la regarde tous les jours et on répète les points importants en se lavant les dents le matin (et le soir, si, si)
On peut utiliser cette liste lorsqu’on résout des problèmes tactiques. Mais on n’y touche pas. Pourquoi pas en créer une autre spécifiquement pour la tactique (quand je peux clouer, attirer une pièce pour la clouer, quand je peux capturer une pièce, vérifier comment la pièce est défendue).
Mise en pratique lors de parties d’entrainement
Parties d’entrainement avec un partenaire ou contre un moteur d’échecs, si possible avec un niveau supérieur de quelques centaines d’elo. La feuille est à côté de l’échiquier et on la consulte à chaque coup. Il est sans doute plus commode, quand la liste s’allonge, d’ordonner les erreurs à fixer selon les phases du jeu ou les situations (ouverture, milieu de partie, roques opposés, supériorité matérielle, centre fermé, finales de pions) ou le protocole de réflexion. Si, au départ, on peut se contenter d’idées générales (vérifier ce que peut faire l’adversaire s’il rejoue une deuxième fois la pièce qu’il vient de déplacer), il faudra certainement affiner par la suite (vérifier ce que la pièce menace et ce qu’elle ne protège/contrôle plus après ce déplacement), puis vérifier ce que la pièce menace et ce qu’elle ne protège/contrôle plus après ce déplacement et vérifier s’il n’existe pas une deuxième menace . Ne pas se noyer dès le départ avec une liste de 15 erreurs à ne pas commettre. A la fin de la partie, rechercher les erreurs, vérifier si elles appartiennent à la liste ou si elles ont été évitées justement grâce à cette liste.
Si on a tout faux et qu’on n’a pas tenu compte des précédentes erreurs : on laisse en gras.
Si on s’est trouvé dans la situation à risque (telle que deux tours face à face : cf point 6) et que la liste a permis d’éviter une erreur : on met en normal (= pas en gras !). Mais on n’efface pas la ligne correspondante.
Si aucune situation à risque correspondant à l’erreur s’est présentée pendant la partie : on laisse en gras.
Initialement, cela donne ça :
- anticiper en priorité les déplacements des cavaliers, sur 2 (deux) coups
- lors d’une incertitude entre deux coups qui semblent équivalent en terme d’avantage, choisir celui qui « questionne » l’adversaire
- ne pas se laisser abuser par des menaces fantômes (visualisation)
- réfléchir sur 1,5 coups au minimum systématiquement
- quand on peut mettre en échec, capturer ou menacer, rechercher toutes les coups permettant de le faire
- Maintenir une tension au lieu d’échanger
Et si j’ai résisté à la tentation de pratiquer un échange inapproprié, cela devient :
- anticiper en priorité les déplacements des cavaliers, sur 2 (deux) coups
- lors d’une incertitude entre deux coups qui semblent équivalent en terme d’avantage, choisir celui qui « questionne » l’adversaire
- ne pas se laisser abuser par des menaces fantômes (visualisation)
- réfléchir sur 1,5 coups au minimum systématiquement
- quand on peut mettre en échec, capturer ou menacer, rechercher toutes les coups permettant de le faire
- Maintenir une tension au lieu d’échanger
Il est possible que d’autres erreurs surviennent dans ces parties d’entrainement et il faudra les intégrer dans cette liste.
Les parties d’entrainement peuvent être centrées sur une ou deux erreurs afin de ne pas se disperser. Il est probable qu’en se concentrant spécifiquement sur un point ou deux après le coup de l’adversaire la mémorisation de l’erreur soir meilleure, avec par exemple :
- Est-ce que je peux capturer la pièce qui vient de se déplacer ou toute autre pièce ?
Et lorsque le point 1 est acquis (à savoir qu’il était possible de capturer une pièce et que cela a été intégré dans le choix des coups candidats, t ceci au cours de plusieurs parties), on passe à ceci :
- Est-ce que je peux capturer la pièce qui vient de se déplacer ou toute autre pièce ?
- Quel peut-être la prochaine case que cette pièce peut occuper si elle pouvait se déplacer de nouveau ?
Il est donc probable en se concentrant sur 1 à 2 points précis, que des parties soient perdues sur Chess.com ou Lichess car le temps viendra à manquer ou que d’autres erreurs feront leur apparition.
Et on recommence une autre partie d’entrainement.
Et on révise aussi avant chaque partie officielle (interclub, Open)
On peut compliquer le principe en mettant en gras et en MAJUSCULE le point qui n’a pas été appliqué ! Ainsi, si j’ai joué 5.h3 pour empêcher un Fg4 en ayant les blancs, sans raison valable, la ligne :
3. Ne pas se laisser abuser par des menaces fantômes (visualisation)
devient :
3. NE PAS SE LAISSER ABUSER PAR DES MENACES FANTÔMES (VISUALISATION)
Et puis si une erreur a été corrigée sur le long terme, pourquoi pas la retirer afin d’alléger la liste.
N’oublions pas que, généralement, on perd une partie parce qu’on a fait une erreur !
Si vous connaissez d’autres techniques d’entrainement pour corriger/fixer des erreurs, je suis preneur.
C’est pas clair ? Laissez un commentaire.