Réfléchir aux échecs, c’est un peu comme si on faisait de la physique quantique : soit on prévoit 5 à 10 coups (ou plus) sur une suite forcée, soit on réfléchit sur 1 à 3 coups sur plusieurs coups candidats !
J’ai lu quelque part qu’un moteur d’échecs réglé sur une profondeur de 2 coups a un niveau de 1600 elo (environ, allez on va dire entre 1500 et 1700), et Andrew Soltis nous dit aussi que réglé sur 4 coups, c’est équivalent à un niveau de Maitre (2100-2300 elo). Donc, se contenter de 2.5 coups devrait être suffisant dans la plupart des cas.
L’adversaire vient de jouer :
- Un coup : on envisage notre réponse, et on regarde ce que peut jouer l’adversaire.
- Deux coups : sur cette réponse on regarde ce qu’on peut jouer, et ensuite comment l’adversaire réagit
- Deux coups et demi : est -ce que je peux répondre de façon satisfaisante ?
Dans la majorité des cas, 2,5 coups suffisent si la position ne requiert pas une analyse tactique avancée. Un des corollaires : même si vous avez en face de vous un joueur nettement meilleur, 2.5 coups suffisent, pas la peine d’aller plus loin (et inversement : face à un joueur moins fort : il faut aussi réfléchir sur 2.5 coups).
L’aptitude au calcul nécessite deux compétences : la visualisation, et l’évaluation (évaluation avant de commencer à réfléchir, et avant de jouer son coup candidat).
Quelques pistes pour travailler la visualisation.
- Connaitre la couleur des cases en fonction de leurs coordonnées. En fermant les yeux, quelle est la couleur de la case a1 ? b2 ? c3 ? etc. Puis couleur de la case a8 ? b7 ? c6 ? etc… (autant en se mettant du coté blanc que du coté noir). Couleur de a1, a2, a3 ? etc. On peut aussi visualiser la couleurs des cases sur lesquelles les pièce se trouvent lors de la position initiale. En allant plus loin, on peut, pourquoi pas, visualiser les couleurs de cases des premiers coups d’une ouverture. 1. e4 : quelle couleur? 1. … c5, quelle couleur ? Cf3, quelle couleur ? et ainsi de suite.
- Préparer un échiquier avec un roi, une tour, un cavalier et un fou, disposé de façon aléatoire. On peut commencer avec moins de pièces. Regarder la position et fermer les yeux pour le reste de l’exercice. Demander à un partenaire d’entrainement de déplacer une pièce et de dire (par exemple, si la tour se trouve sur la colonne c ou la 8eme rangée) : « Tour, c8« . On devra alors dire à haute voix les coordonnées des pièces et quelles sont les nouvelles interactions entre celles-ci : « Désormais la tour est sur la même ligne que le roi, et est sous la protection du cavalier. » Accessoirement dire la couleur des cases de chaque pièce. Répéter l’exercice autant de fois que le cerveau sera disponible ! 10, 30, 40 coups.
- Études de mats : on évoque ici les 5334 problèmes de Laszlo Polgar. Mais Chessbase nous donne la possibilité de créer ces études.
- Lire des parties sans déplacer les pièce sur un échiquier, disposer les pièces sur un échiquier lorsqu’on arrive à un diagramme, comparer le résultat de la visualisation avec le diagramme et continuer la partie de la même manière. L’emploi d’un logiciel est tout aussi valable : lire les 5 premiers coups, disposer les pièces sur un échiquier, comparer, corriger la position si besoin, et recommencer. Si 5 coups est trop compliqué, descendre à 2 ou 3 coups.
Quelques pistes pour travailler le calcul et l’évaluation
- Un peu à la manière des échecs en solitaire : choisir une partie de grand-maitre et une position remarquable. La travailler sur 2.5 coups. On peut utiliser un livre d’ouverture (tel que le NCO avec ses tableaux ésotériques) et choisir une ouverture dont une variante est jugée soit peu claire, soit égale. Y réfléchir sur 2.5 coups.
- Jouer aux dames : certaines écoles d’échecs soviétiques encourageaient leurs élèves à pratiquer ce jeu en fin de session afin de se décontracter tout en gardant un esprit d’analyse !
- A la fin du calcul de quelques coups, donner une analyse de la future position (attention : les pièces doivent rester en place), avec =, +-, +/-, etc. Tester éventuellement ses capacités d’analyse avec Chessval.
Il est certainement utile de s’habituer (= s’entrainer !) à évaluer la menace de l’adversaire. Puis quand ce réflexe est acquis, prendre l’habitude d’envisager les meilleurs coups candidats possibles. Puis systématiser la réflexion sur les réponses possibles de l’adversaire (en gros : ses coups candidats à lui !). Et ainsi de suite sur 1 coup, 1.5 coups, 2 coups et finalement sur 2.5 coups.
Et vous, comment réfléchissez-vous ?
D’après « Study chess made easy » d’Andrew Soltis
chapitre « Two-and-a-half move chess »