On parle bien des tournois d’échecs de la vraie vie, quand on a en face de soi un être humain, de chair et de sang. Quand on joue sur un échiquier de 45 sur 45 cm, avec des pièces en bois lestées. Quand on est obligé de noter les coups sur une feuille de papier. Quand on a faim, chaud, soif, ou que le stress vous amène des battements cardiaques à 160. Quand on a parcouru parfois plusieurs centaines de kilomètres pour s’enfermer pendant plusieurs jours. Enfin, bref : un tournoi.
Tout ça pour dire qu’un des moyens les plus efficaces pour progresser est d’y participer ! Le calcul est simple. Admettons deux parties d’interclub par an, pas plus. La plupart du temps contre des adversaires à plus ou moins 150 elo par rapport à votre niveau. Admettons deux parties par an, gagnées contre des adversaires à +150 elo. La gain sera de 26 points (environ) sur les deux parties. De 1400 elo (par exemple), on atteint 1426. Même si votre niveau réel a un potentiel de 1850, le retour sur investissement n’est pas terrible ! Mais avec un tournoi contre 6 adversaires à +150 elo (c’est une hypothèse) le gain sera de 78 points en 3 jours, soit au final 1478. Trois tournois dans l’année : on arrive à 1634. On est bien loin du maigrichon 1426 des deux parties annuelles d’interclub.
Mais au delà du simple calcul mathématique, l’expérience acquise ne peut être que bénéfique. On va plus facilement retenir un piège d’ouverture si on le rencontre dans un tournoi plutôt que dans un blitz à 23h47 sur Lichess avant d’aller dormir. La mise en place d’une réflexion profonde (système 1 et système 2 évoqués ici) ne peut être que profitable. Avoir en face de soi un adversaire qui joue dans les mêmes conditions (même s’il n’a fait que 15 km pour participer à ce tournoi alors que vous en avez 350) donne une image plus proche de votre niveau plutôt que de jouer en ligne en soirée en buvant une Kwak, avec Ed Sheeran en musique de fond, alors que votre adversaire se dépêche de finir sa partie rapide pour aller promener le chien ensuite, alors que 15 minutes avant il était encore entrain de coucher ses deux enfants (dont un qui a peur du monstre sous le lit). Les efforts concédés (emploi du temps, vie de famille, dépense financière, fatigue) pour jouer dans un tournoi nous impliquent plus dans notre travail préparatoire et notre débriefing. Le bénéfice en est que meilleur.
On peut avancer l’hypothèse qu’un plus ou moins jeune adolescent, outre son aptitude à mieux transformer ses connaissances en aptitudes/compétences, avec moins de contraintes comme celles évoquées ci-dessus, mais avec une logistique (parents, clubs, prise en charge financière) lui permettent probablement plus qu’un adulte de 30-50 ans de participer à ces tournois. Cette même décharge de responsabilité rend certainement le cerveau plus apte à s’imprégner des notions apprises.
Les coaches/auteurs sont toutefois partagés sur le nombre optimum de parties « sérieuses » par an, sachant qu’il faudra dégager ensuite quasiment autant de temps pour les analyser correctement. Un tournoi occupe en gros une semaine d’analyse. Un tournoi par mois va laisser 2 à 3 semaines d’entrainement sur ce même mois, mais procure une soixantaine de parties annuelles. Un tournoi par trimestre est certainement un bon compromis entre le coût et les disponibilités de l’emploi du temps.
Et vous, combien de parties officielles par an ? Combien de tournois ?